Finalement j'ai réussi à trouver des détails sur les bases de lancement de Rittersdorf et d'Idenheim! Après une rencontre avec Bernhard Groß, qui a passé de longues années avec des recherches sur les sites de lancement pour missiles Mace et Matador, j'ai sa permission de vous présenter ses travaux.
La source allemande des textes et les illustrations suivantes sont - sauf indication contraire - sous le droit d'auteur de Bernhard Gross (bernhardgross (at) t-online (dot) de). La traduction française est sous le droit d'auteur de www.darkplaces.org et ne doit être publiée qu'avec mon accord.
La fin de la seconde guerre mondiale menait directement à la guerre froide. Des provocations permanentes et la crise de Cuba soulignaient le potentiel agressif de l'USSR. Pour contrer le pacte de Warsovie et pour disposer des mêmes armes, les américains ont élaboré des missiles sol-sol.
Le début de ce développement est basé sur les essais de l'ingénieur Wernher von Braun et la technologie allemande. La réproduction américaine de la V1, dénommée la "Loon", était suivie de nombreuses améliorations et menait à l'élaboration des missiles de croisière. Une de ces élaborations était la missile de croisière "Matador" et son successeur "Mace".
Martin TM-76/MGM-13/CGM-13 Mace
La Mace était une amélioration de la missile Matador TM-61. Par conséquence, elle fut tout d'abord dénommée TM-61B „Matador B“. Primordial pour ce développement était le système de guidage télécommandé, malheureusement à portée très réduite et difficilement maniable. La Mace était équipée de nouvelles ailes et avait un corps plus long ce qui augmantait la portée à 1300 kilomètres. De plus, la Mace pouvait être transportée en entier (à l'exception du booster de lancement, la "bouteille RATO" - voir plus bas) sur une remorque de lancement.
La transformation majeure était cependant le nouveau systeme de guidage dénommé ATRAN (Automatic Terrain Recognition And Navigation = reconnaissance automatique du terrain et navigation automatique). ATRAN, conçu par Goodyear, s'adaptait à l'echo radar provenant de la surface terrestre et permettait à la missile de suivre une trajectoire définie. ATRAN était donc la première mise en oeuvre du système de guidage moderne TERCOM (TERCOM = Terrain Contour Matching = Adaptation au terrain). Le système travaillait de manière compètement autonome et ne se laissait pas influencer par les interférence électromagnétiques ennemies. L'inconvénient su système était qu'il fallait disposer d'images radar de la région ciblée ce qui n'était pas évident à l'époque (années 1950). Les premiers essais de la YTM-61B avaient lieu en 1956.
A cause des différences envers son prédécesseur, la TM-61 Matador, la YTM-61B/TM-61B Matador B fut rebaptisée "YTM-76/TM-76 Mace" au début de l'année 1958. La production en série portait la dénommination TM-76A. Le premier escadron de TM-76A fut mis en places en 1959 et peu après beaucoup de missiles Matador furent remplacés par des missiles Mace.
La TM-76B, dont le développement commençait en 1959, avait un sytème de contrôle à inertie. Ceci permettait à la Mace B une altitude qui doublait la portée. Cependant ce système nécessitait les coordonnées exactes de la base de lancement et rendait une utilisation mobile impossible. Par conséquence la Mace B fut installée dans des sites de lancement bétonnés. L'avantage était que leur temps de mise en batterie était très court. Le premier lancement d'une TM-76B avait lieu le 11 juin 1960 et les pemières missile de croisière prêts à l'emploi étaient installés en 1961. En 1963 la TM-76 Mace fut rebaptisée en "Série M-13".
Avec cette nouvelle dénomination, la TM-76 devenait la "MGM-13A", la TM-76A devenait la "MGM-13B" et la TM-76B devenait la "CGM-13C". La confusion était totale. Donc on procédait en 1964 à un nouveau changement de nom. La TM-76 (MGM-13A) disparaissait, la TM-76A devenait la "MGM-13B" et la TM-76B était rebaptisée en "CGM-13B".
Le tableau suivant devrait clarifier l'évolution des noms:
1956-1958 |
1958-1963 |
1963-1964 |
1964 - … |
TM-61B |
TM-76 |
MGM-13A |
- |
- |
TM-76A |
MGM-13B |
MGM-13A |
- |
TM-76B |
CGM-13C |
CGM-13B |
En 1965, le ministre de la Défense McNamara ordonnait le remplacement de la Mace par la MGM-31A Pershing de l'armée de l'air américaine. A partir de 1966 le retrait des MGM-13A fut mis en oeuvre et en 1971 la Mace ne fut plus en activité.
Données techniques des missiles TM-76A (MGM-13A):
Longueur: |
13.600 mm |
Envergure des ailes: |
7.000 mm |
Diamètre: |
1.200 mm |
Poids: |
8.500 kg |
Vitesse: |
1.040 km/h (Mach 0,9) |
Altitude maximale: |
12.200 m |
Portée: |
1.300 km (TM-76B: 2.400 km) |
Motorisation: |
Lancement: Thiokol, pousée: 430 kN |
Ogive: |
Ogive W-28 thermonucléaire (1,1 MT) |
Les missiles Matador et Mace pouvaient être équipés de têtes nucléaires et étaient aussi stationnés en Allemagne (OTAN).
En Allemagne existent les bases de lancement américaines suivantes:
Sembach: Typ TM-76A (CGM-13A)
Base de lancement Nr. 1: Mehlingen (RFML) / 12 missiles (mobile, en surface);
Base de lancement Nr. 2: Enkenbach (RFML) / 12 missiles (mobile, en surface)
Base de lancement Nr. 3: Grünstadt (RFML) / 12 missiles (mobile, en surface)
Hahn: Typ TM-76A (CGM-13A)
Base de lancement Nr. 4: Wünschheim (RFML) / 12 missiles (mobile, en surface)
Base de lancement Nr. 5: Kirchburg (RFML) / 12 missiles (mobile, en surface)
Base de lancement Nr. 6: Hundheim (RFML) / 12 missiles (mobile, en surface)
(RFML = Rapid Fire Multiple Launch = site non-bétonné en surface)
Bitburg: Typ TM-76B (CGM13B)
Base de lancement Nr. 7: Rittersdorf / 8 missiles (silos de lancement souterrains et bétonnés)
Sur l'aréal de la base de lancement à Rittersdorf se trouve aussi un poste de commandement anti-atomique de l'OTAN non relié aux silos de lancement. Ce bunker se trouve à 30 m sous terre et fonctionnait de manière autonome. L'accès pouvait se faire par deux entrées - une entrée personnel et une entrée matériel. Toutes les localités contenant des appareils électroniques étaient suspendues à des ressorts pour éviter des secousses et sauvegarder ainsi le matériel électronique lors d'un bombaredement éventuel.
(Source: inconnue)
Quatre tours d'aération (deux pour air frais et deux pour air vicié) servaient, après filtrage, à l'aération de l'ouvrage. A l'intérieur se trouvait le matériel informatique et les autres installations électroniques. Presque toutes les localités disposaient d'un système d'extincteurs au halon.
Base de lancement Nr. 8: Idenheim / 8 missiles (silos de lancement souterrains et bétonnés)
La base de lancement bétonnée à Idenheim est identique à celle de Rittersdorf. Cependant il n'y a pas de bunker anti-atomique.
Bitburg: Typ TM-61C ("Matador")
Base de lancement à Steinborn / Nombre de missiles inconnu (mobile, en surface)
La TM-61C fut encore une vraie Matador et la base de lancement à Steinborn fut la dernière en Europe. Elle fut désactivée en 1962.
En résumé il n'y avait en Allemagne que deux bases de lancement bétonnées: Le „Launch site 7“ près de Rittersdorf et le „Launch site 8“ à proximité d'Idenheim.
Les deux sites ont été abondonnés fin des années 60 - non vidés mais encore surveillés par l'armée américaine de la Bitburg Air Base. Aujourd'hui la base de Rittersdorf appartient à un entrepreneur. La base d'Idenheim appartenait longtemps à un vendeur d'automobiles. D'après mes dernières informations il s'y trouve maintenant un terrain de paintball.
Ci-dessous quellesques illustrations sur la conception et le fonctionnement des bases de lancement de Rittersdorf et d'Idenheim (les deux sont identiques):